Work in progress
Ce nouveau travail photographique a été initié par Bernard Gomez lors d’un printemps confiné dans l’enclos d’un jardin.
Confronté à l’enfermement, à l’isolement, le photographe a réduit le champ de son exploration jusqu’à l’épure. Il fait face à l’énigme de la nature morte : l’objet, le plan de la feuille blanche sur laquelle il est déposé, la frontalité de la prise de vue, la lumière.
Son sujet est ici la fleur coupée, au bord de son flétrissement inexorable. La photographie pourrait l’arrêter, l’abolir. Mais le photographe par son geste, choisit de le transfigurer. La fleur violentée, pressée, dont le suc colorant s’épand comme le sang d’une blessure, compose alors un tout autre récit. L’objet inanimé, le sujet inerte, devient ici « l’être fleur ». Il parvient à saisir, à fixer, à inscrire, ce qu’il faut bien nommer sa mort.
Il y a de la violence et de la résilience dans ce geste, il y a du vertige dans l’image produite : c’est un cri d’agonie autant qu’une renaissance.
Au fil des saisons, les fleurs se succèdent sur l’autel de leur sacrifice : iris, pois de senteur, pivoines, géranium botaniques, glaïeuls, cosmos … Toutes les fleurs ne se prêtent pas à l’exercice. Au fil du temps qui passe la démarche se déploie en une prolifération de formes et d’écritures. Ce sont autant de messages énigmatiques que les fleurs tracent avec leur propre sang.
Le travail évolue, se décline. Les fleurs fanent, sèchent, se fossilisent sur la page. L’image est parfois complétée d’une intervention graphique … La recherche est en cours et ne s’achèvera sans doute pas avec la saison des fleurs qui saignent. Ce work in Progress n’a pas fini de résonner.